Les différents degrés de la générosité
Comme souvent, voici un petit exposé qui découle de mes propres déductions. Aujourd'hui, je vous parle de l'importance de l'état d'esprit qui accompagne un acte de générosité.
Qu'il s'agisse d'une aide ou d'une donation, il existe différentes raisons qui poussent un individu à faire preuve de générosité. Chacune de ces raisons correspond, selon le cas, à un degré de mérite plus ou moins important.
Concernant le bénéfice karmique d'un don (don matériel, aide, soin), la qualité (ou la valeur) de celui-ci compte, mais celles de la vertu et du détachement du destinataire aussi. Le mérite acquis n'est pas le même selon si l'on offre un repas à un être éveillé, à un individu malhonnête ou à un animal. Toutefois, l'intention du don est sans doute le plus important.
Les motivations du don
voici, selon moi, un classement des 5 principales motivations de don, classées par ordre décroissant de qualité.
- Joie saine / Admiration
- Bienveillance / Compassion
- Pitié
- Avidité
- Peur de la honte
Remarque : Plusieurs de ces motivations peuvent être impliquées lors d'une donation.
Joie saine / Admiration
On veut aider celui qui fait ce qu'on n'est soi-même pas capable de faire. Si le destinataire est dans le besoin, car il renonce, se consacrant au travail intérieur, on lui donne parce qu'on éprouve une certaine vénération. On donne par admiration. L'état d'esprit est sain, bienveillant et humble, voire dévotionnel.
Bienveillance / Compassion
Le don est naturel, il n'est pas calculé. On est heureux de l'opportunité de donner, de rendre service. On donne parce qu'une personne a un besoin, on a la possibilité de lui donner, on lui donne. Si le destinataire est dans le besoin car il est infortuné, on lui donne parce qu'on éprouve de la compassion. On veut aider celui qui n'a pas notre bonne fortune. Dans ce cas, l'état d'esprit est sain et bienveillant.
Pitié
Il y a un mélange de dédain et de compassion. On donne plus pour se défaire d'une situation indésirable que par pure générosité. Ce dont peut même être motivé par une part de cruauté, mais la gentillesse reste encore majoritaire. Ici, l'état d'esprit est mitigé, il comporte de la compassion, mais aussi du dédain.
Avidité
Le don est clairement intéressé. Ici, la principale motivation, c'est le profit personnel. On donne parce qu'on sait que l'on sera admiré, qu'on bénéficiera d'un avantage en retour, que cela rapporte des mérites, comme "des points pour une place dans les mondes célestes" quand on apporte une aide ou une offrande à un "moine". L'état d'esprit est dominé par un désir malsain.
Peur de la honte
Là, la générosité est minime. La volonté de donner n'est plus de mise. On ne donne plus avec le cœur, mais seulement pour éviter d'être critiqué ou mal vu. L'état d'esprit principal est le mécontentement ; on donne alors qu'on ne veut pas donner.
Merci pour ta précieuse aide, Kassinou. Grâce à toi, je vais pouvoir parler d'une chose tout aussi importante que le don, à savoir : la gratitude !
La façon de recevoir
Accomplie avec l'état d'esprit juste, la gratitude peut apporter un mérite aussi considérable que la générosité. À l'instar des raisons qui motivent un don, la gratitude se manifeste selon différents niveaux de qualité. On peut recevoir avec une joie profonde, une gratitude légère ou une indifférence complète accompagnée d'un remerciement forcé.
Il est intéressant de noter que la qualité de la gratitude n'a aucun lien avec celle du don. Effectué à contrecœur, le plus vil des dons peut très bien donner lieu à la plus grande des gratitudes. Donateur et receveur, à chacun sa pratique ! Ainsi, on devrait toujours pratiquer la plus belle des gratitudes, quel que soit l'état d'esprit du donateur (comme au-dessus, où Kassinou ne me donne une suggestion avec orgueil, voire moquerie, mais où je le remercie avec sincérité).
De la même façon, il convient de savoir donner avec le plus bel état d'esprit, sans attendre la moindre gratitude en retour. Si la moindre réaction favorable est attendue, c'est la preuve que la générosité est incomplète. En outre, la façon juste de recevoir implique le fait d'accorder plus d'attention au donateur et à son intention, plutôt qu'à l'objet de son don (ou service rendu). Même sur un don effectué de très mauvais cœur, on peut déployer la plus rayonnante des gratitudes. Cela peut même inciter le donateur à corriger son tir en éprouvant naturellement après coup de la bienveillance.
La gratitude est une forme de bienveillance qui peut tout aussi bien être dirigée vers autre chose qu'un être humain ou animal : un arbre, la nature, l'univers, ou pourquoi pas, un objet matériel ! La seule chose qui compte est son état d'esprit, peu importe la présence ou non d'autres êtres vivants. C'est pourquoi les renonçants peuvent s'accomplir même dans la solitude.
Concernant les êtres nobles
Grâce à sa pratique soigneuse de la vertu et du détachement, un être noble obtient facilement ce dont il a besoin. Cependant, cela peut lui être donné de bien diverses façons, selon l'état d'esprit de celui qui lui fournit une donation ou une aide. Pour l'être noble, il n'y a pas de différence. Il ne tient pas rigueur des émotions des autres, comme à peu près tout le monde fait constamment, ce qui ne fait qu'apporter une masse de souffrance inutile. Par contre, pour le donateur, selon son état d'esprit, la différence de mérite peut être considérable.
Et rappelons-le, soutenir un être sérieusement investi dans la méditation, la vertu et le renoncement est extrêmement bénéfique. Pour qui ne peut en faire lui-même autant, il s'agit même de la meilleure action possible pour améliorer son conditionnement karmique.
Bien donner et bien recevoir constituent une pratique accessible à tous, et impliquent des qualités essentielles à l'accomplissement spirituel, comme : la compréhension, la patience, le détachement, la vigilance, la bienveillance, et bien entendu, la générosité et la gratitude.